Jacques Miermont

Psychiatre des Hôpitaux, coordonnateur d’une Fédération de Services en Thérapie Familiale, président de la Société Française de Thérapie Familiale. Unité de Consultation Familiale, 80 rue de Verdun, 94800 Villejuif.

Résumé : Les thérapies familiales regroupent un ensemble de pratiques où au moins deux personnes apparentées, confrontées à des troubles mentaux, comportementaux et/ou relationnels, consultent dans une perspective thérapeutique. Il peut s’agir de troubles graves et violents, avec un risque vital, tels que les troubles psychotiques, psychosomatiques, démentiels, les troubles des comportements alimentaires, les conduites d’addiction, les comportements de négligence, de maltraitance, d’abus sexuel. Il peut s’agir également de difficultés de couple, de problèmes éducatifs, de perturbations des communications, de passions familiales.

Ces pratiques résultent de la différenciation, de l’articulation, voire de la confluence de plusieurs courants : psychodynamiques, écosystémiques, cognitivo comportementalistes, psychoéducatifs, narratifs, éco-étho-anthropologiques. La confrontation de ces conceptions multiples permet d’ajuster les interventions thérapeutiques en fonction des singularités cliniques rencontrées, et de la complexité des problèmes à appréhender et à résoudre. Dans cette perspective, les thérapies familiales participent à l’évolution et à la transformation des contextes d’interventions et de soins.

Mots-clés : cothérapies élargies, cycles de vie, double bind, émotions exprimées, épistémès, hiérarchies enchevêtrées, metabindings, mythes, loyautés invisibles, psychoéducation familiale, rituels, thérapies comportementales et cognitives, thérapies systémiques diachroniques et synchroniques, thérapies de couple, thérapies familiales, thérapies familiales psychodynamiques, transfert, transmissions multigénérationnelles, triangles.

Abstract : Family Therapies regroup a set of interventions where two family members at least who have to deal with mental, behavioral and/or relational troubles are consulting in a therapeutical purpose. It may be high mental or behavior disorders with violence and dangerosity, with a vital risk ; it concerns psychotic, psychosomatic, dementia, eating, addictive, neglect or ill-treatment, sexual abuse disorders. Il may be too marital troubles, educational problems, communication disturbances, family passions.

These practices result from the differenciation, the articulation or even the confluence of different streams, such as psychodynamic, ecosystemic, behavioral, cognitive, psychoeducationnal, narrative, eco-etho-anthropological ones. The confrontation of these multiple conceptions allows to adjust therapeutic interventions according to the clinical singularities, and the complexity of the problems to recognize and to solve. Family therapies may so participate to the evolution and the transformation of interventions and healing contexts.

Key-words : behavioral and cognitive family therpy, broadened cotherapies, diachronic and synchronic systemic family therapies, double bind, epistemes, expressed emotions, family psychoeducation, family therapies, invisible loyalties, life cycles, marital therapies, metabindings, multigenerational transmission, myths, psychodynamic marital and family therapy, rituals, systemic marital and family therapy, tangled hierarchies, transferance, triangles.

Définition des thérapies familiales

Le terme de « thérapies familiales » permet de désigner un ensemble de pratiques et de théories où l’on considère qu’un ou plusieurs symptômes mérite(nt) l’implication du contexte familial dans son traitement. Le plus petit “commun dénominateur” des thérapies familiales est ainsi constitué par la coprésence bénéfique, lors des séances, d’au moins deux personnes d’une même famille, dont l’une au moins est confrontée à des difficultés qui motivent à consulter.

Ces difficultés peuvent être liées à une personne non présente lors de la consultation. Dans certains cas, le symptôme concerne les relations familiales et est partagé par l’ensemble du groupe familial ; dans d’autres situations, un patient peut être aidé, soigné, voire guéri grâce à la participation active des personnes avec lesquelles il partage une destinée de vie familiale ; dans d’autres cas encore, plusieurs personnes d’une même famille présentent des symptômes, voire des maladies spécifiques. La question de savoir si la thérapie est centrée sur le système familial global, sur un sous-système (en particulier le couple) ou sur un patient, reste ouverte.

Les thérapies familiales sont apparues vers les années 1950 aux États-Unis d’Amérique, à partir de la constatation empirique qu’il était possible de venir activement en aide à des personnes en grande souffrance psychopathologique, juridique, sociale (le plus souvent avec des risques vitaux), en réunissant les membres de leur famille dans des unités de temps, de lieu et d’action, selon certaines techniques appropriées.

L’affinement de ces techniques a été rendue possible par la confrontation de paradigmes épistémologiques variés (psychanalytiques, éco-systémiques, comportementale-cognitivistes) qui permettent une organisation pluridisciplinaire des données psychosociologiques, ou plutôt éco-étho-anthropologiques ; ces données sont mises au service de confrontations cliniques pluriprofessionnelles (médecins, psychiatres, infirmiers, psychologues, travailleurs sociaux, etc.) ; ce qui conduit à appréhender les groupes familiaux et sociaux comme des « éco-systèmes », aux fonctions et aux finalités multiples (le terme d’écosystème vient du grec “oikos” : maison habitat, salle à manger, temple, tombeau, train de maison, biens propriété, famille, race) et sustema (réunion en une seule entité soit de plusieurs objets, soit de diverses parties d’un même objet ; dans cette perspective, on pourra envisager la famille comme l’écosystème fondant les…

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